Villa Eberman 16. VI 1905

Ma chere et douce amie

Votre lettre ma a fait du bien — je la lis et la relis, et elle me donne plus de «Vous», de votrc «Moi», que vous ne pretendiez peut etre m'y faire parvenir. Je la combine mentalement a la pivoine rose et mystiquement ensoleillee qui s'epanouit tout pres de mon balcon et je pense a Vous… et tout enfoui dans la salete de mes bouquins je ne fais que penser a Vous, si entouree et pourtant si seule et si mystiquement ensoleillee du feu de ma pensee solitaire…

Mais je vous vois madame tout en vous plaisant un brin a ces preciosites, au fond de Votre «Moi raisonnable» me reprocherma faineantise sans nom… «Il m'a promts pourtant de travailler»… Si fait, chere dame, Euripide va toujours son petit train, et je suis a Theramene deja cet октябрист unpayable et «fin desiecle». Ma barque a deja noye Ie dandysme scelerat d'Alcibiade dans l'eubli prochain de ma nouvelle oeuvre, et Aristophane attend son tour en causant «en enfant de bonne maison» avec Euripide son ennemi personnel, que j'ai eu la maladresse d'entasser avec lui dans Ie desordre de mes feuilles ecrites au crayоn. Mats je me vois oblige de leur donner quelque jours de treve a tous sur l'appel sinistre du Ученый Комитет dont j'ai manque oublier la queule de

Moloch inassouvi.

C'est dimanche aujourd'hui — ennui fatal de… jeu de preference et de causeries fades et languissantes.

Je Vous entends, mon amie, me demander de mes nouvelles.

On, je suis toujours a la surface, — mais c'est tout ce que j'ai pour me consoler. Le coeur est faible, — et la pensee fievreusement agitee, me travaillant… sans avantage meme pour les generations a venir.

A vous de coeur… pas si faible alors — non

I. A.